116- à mes dépends

Ceux qui m’échappent

Ceux qui m’emballent.

comme une mouette apporte l’iode à mon souffle

comme toi qui apporte l’ivresse des profondeurs

à mes dépends, de mon fait, sur mon dos

tu t’y tailles un pique nique

j’ai perdu la limite de mon respect,

de mes amours.

Où suis-je ? Qui suis-je ?

lorsque je ne suis plus noyée en toi.

est ce que j’existe seulement?

plus de force.

je navigue à vue dans cette mer grise,

Alexandrie est morte et son phare gise.

le port englouti comme un poême,

je me langui, en appelant les sirènes.

un temps viendra pour la renaissance,

joie, vie, à s’en éclater la panse !

là, à contre courant dans la brume,

je sombre comme une enclume.

Je bats mes tempes, écorchée par les larmes,

me voilà sur la brèche, happée par mon âme.

fragile comme du verre de Venise

je me sens m’effondrer sous la bise.

Toi, ma mère, je te prends à témoin

je te haïs, te méprise, te visite de loin

honte à toi, mère qui ne m’aime pas !

ou mieux encore, qui t’aime à travers moi !

m’aurais tu enseigné le respect de soi

j’aurais pu vivre libre, ou du moins vivre moi.

regret qui te ronge, vile peinture sur un visage roi.

serais je reine, Isis, un jour en mon royaume ?

serais guerrière, couronnée de son heaume ?

amante des étoiles au corps de son homme?

dame au tambour, tempête rugissante qui tonne ?

Mère puissante guéri ce qui hante, panse la béance.

dans ta respiration je vis,

dans ton coeur je guéri.

Je m’agenouille au pied de mon frère le Pin

j’écoute l’eau qu’il appelle, la pluie, la vague, l’eau de vie.

L’esprit du Pin, Frère.

J’écoute la Pie qui toujours me suis.

Je me couche, m’accroupi.

Tout se tait, se ralenti, je vis enfin à mon rythme. Seule. Je vis. La terre bat dans mon ventre, dans mon coeur, les étoiles de mes yeux se rallument, les rêves viennent me visiter.

Perdue

lorsque je te quitte, nature, je me quitte.

pourtant je m’invoque, faiblement, de revenir habiter ce corps vide.

je suis bloquée dans cette nuit noire de l’âme. Encore. ça colle comme de la résine de Pin. pourtant lui s’élève haut malgré le mistral.

merci pour le facile, merci pour le complexe.

j’apprends à mes dépends qu’on ne se perd pas impunément.

Celle qui pèse la Vérité y veille.

115- Gratitude et épreuves

Depuis Novembre je fais l’expérience de la gratitude quotidienne. Je peux dire qu’avant ça je me sentais reconnaissante pour des faits, des actions précises. Je n’avais jamais éprouvé autant de gratitude sur une si longue période et surtout, une gratitude qui ne porte sur rien.

J’étais en comm-union avec mon environnement, ma parenté de tous les règnes. Tout étais fluide et coulait de source. Simplement en changeant le regard que je portais sur ma vie. Car je me suis bâtie sur un modèle assez pessimiste. Ce qui m’offre aujourd’hui une belle mage de progression ^^

Juste en opérant enfin ce pas, changer de perspective. Ce qui ne veut pas dire nier ce qui cloche et avoir une démarche bénie oui-oui. J’ai longtemps fait cette confusion en vérité.

Me sentir chanceuse et bénie que mon clan soit nourri et puisse boire de l’eau potable, qu’un toit (bien que tordu) nous protège des intempéries, les vêtements qui nous tiennent chaud lorsqu’il fait froid, pouvoir se soigner lorsque c’est nécessaire (et jusque là ça n’avait jamais vraiment été le cas… des broutilles), une famille aimante et que j’aime.

J’ai réalisé que ces choses étaient un don immense, que beaucoup n’en avait pas autant. Et que ce n’est pas un droit. Même si ça devrait. Je suis vraiment chanceuse.

J’emploie le mot chance à dessein car c’est ainsi que je le perçois. Je n’ai rien fait qui « mérite » cela. Comme ceux qui n’ont pas de toit ou de nourriture n’ont rien fait qui « démérite ». C’est une question purement aléatoire. Et le fait que certains courants spirituels puissent suggérer qu’un enfant ou un être vivant doive faire l’expérience de la souffrance, de la guerre, de la famine pour je ne sais quelle raison « supérieure » m’irrite. Voilà où j’en suis pour le moment.

Je remercie pour l’air de mon souffle de vie, l’a santé, l’amour et tous les dons qui m’ont été fait et que je négligeais auparavant.

Je n’avais pas d’autre but que d’honorer ces dons. Mais j’ai reçu un cadeau en plus. Une perception infiniment plus riche et vivante de vie.

Depuis gamine je pense que rien n’arrive pas hasard et que même les expériences que l’on qualifie de « négative » dans l’instant, ont un sens ou tout du moins, que nous sommes libre de choisir d’en apprendre une chose positive. Cela ce joue uniquement dans le regard que nous portons là dessus. Faut il qu’on perde la santé pour la savourer ? faut il perdre pour remercier ?

Décembre arrive donc. Une de mes filles va mal. Etrangement je me sens confiante. J’ai peur pour elle, mais je « sais » de manière intense que je dois m’abandonner à la foi, au Grand Esprit, à Dea, à Isis, à nos ancêtres. Et j’agis. Je fais dans la matière ce qu’il faut. Mais dans le coeur, je m’abandonne totalement, le reste est absolument hors de mon pouvoir. Je la confie au monde qui la porte.

Je prie. Je dis merci pour chaque jour auprès de mes enfants. Merci pour tant de cadeaux sur ma route.

Février ma fille entre à l’hôpital. Je ne rentrerais pas dans les détails. Rien jamais ne m’a préparé à ça. C’est violent. Je sens que si je ne tenais pas ce lien au Grand Esprit, je basculerais dans la terreur.

Chaque pas, chaque souffle est un cadeau. Chaque examen, chaque résultat, même « mauvais » est un cadeau. L’opportunité de placer l’amour là où la peur s’était matérialisée. Nous avons eu la chance de pouvoir la faire soigner, de rester avec elle, de la voir se battre comme une reine. Nos rires, nos pleurs, nos doutes, notre confiance tout autant de cadeaux. Tous ceux qui l’ont porté dans le coeur, leurs prières, leur amour… tous ceux qui ont touché son être par la reconnaissance de ce qu’elle traversait ont notre infinie gratitude.

Sait on vraiment comme le fait de reconnaitre le vécu, la douleur, la peine, la joie, d’un autre être est essentiel ? Sait on à quel point c’est puissant sur le chemin du vivant ? la reconnaissance.

C’est clairement l’histoire d’un miracle.

C’est si inouï que j’en doute parfois.

Elle n’a pas conscience de tout ce qui était en jeu.

Aujourd’hui, elle vit, elle marche, elle guéri.

Cela ne laisse plus de place dans ma vie à autre chose que la gratitude et l’authenticité.

Depuis je passe par des remises en questions de ma vie, un grand ménage, une nouvelle nuit noire de l’âme aussi. J’ai confiance. Ce qui n’enlève rien à aux difficultés de la traversée. Mais aujourd’hui j’ai fini par me souvenir de cet apprentissage immense: la gratitude. Je l’avais perdue dans la douleur et les difficultés de l’intégration. J’ai toujours un temps d’intégration après un pas dans ma vie et celui-ci est une marche délicate. La gratitude, leçon immense de ces derniers mois, était passée loin derrière.

Je l’accueille de nouveau dans mon coeur et ma vie.

J’ouvre les yeux sur un paysage chaotique, un dédale de nouvelles aspirations et priorités que je ne sais comment amener dans la matière. C’est très en résonnance avec la Mère de ce troisième cycle lunaire: Celle qui Pèse la Vérité. J’ai besoin de temps dans la tranquillité pour redécouvrir Ce qui est Juste pour moi.